Ces trois formes d’émancipation ont en commun l’idée de liberté mais elles ne libèrent pas de la même chose, ni vers la même fin.
1) L’émancipation individuelle
L’émancipation individuelle consiste à se détacher des contraintes extérieures et des contraintes extérieures intériorisées qui empêchent une personne de devenir pleinement elle-même et de se choisir une vie conforme à ses goûts.
L’émancipation individuelle rassemble l’idée de liberté de pensée, de responsabilité de soi et s’origine dans la pensée des Lumières qui a voulu affranchir la personne de son assujettissement à une autorité spirituelle extérieure et institutionnaliser les valeurs d’autonomie, de rationalité, de liberté.
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L’émancipation individuelle peut être sociale, psychologique ou existentielle.
1.1) L’émancipation individuelle sociale consiste à jouir de ses droits ou, le cas échéant, à faire valoir le principe institutionnel de l’égalité des droits pour les revendiquer. C’est la capacité, pour une personne, de s’autonomiser malgré ou grâce au cadre social, d’y trouver une brèche, un espace pour s’affirmer, se libérer, se sentir libre.
1.2) L’émancipation individuelle psychologique est intime. Il s’agit de se libérer des conditionnements intérieurs: blessures d’enfance, complexe d’infériorité, peurs, croyances limitantes, dépendances affectives. C’est ce qu’on explore en psychothérapie et/ou dans un travail sur soi. On cherche à faire la paix avec soi-même, à gagner en clarté intérieure, à ne plus être gouverné par des schémas inconscients toxiques.
1.3) L’émancipation individuelle existentielle part de la condition humaine nue, sans mode d’emploi, sans transcendance de référence avérée. Elle est plutôt philosophique, athée ou agnostique et ne présuppose rien au delà de l’humain. Elle concerne la relation au sens de l’existence, à la mort, à la liberté fondamentale. L’émancipation existentielle est la libération face à l’angoisse, à l’absurde, à l’inauthenticité. Une réponse vivante est donnée à la grande question: comment vivre de manière vraie, lucide, enracinée, malgré l’incertitude radicale de la vie et l’impuissance à changer le monde comme on le voudrait?
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2) L’émancipation sociale et/ou politique
L’émancipation sociale c’est le soutien ou la participation active à la transformation des structures sociales ou politiques en faveur de certains groupes défavorisés ou en faveur du peuple tout entier, de la population envisagée dans son unité nationale. S’émanciper socialement, c’est lutter pour changer le système des rapports sociaux, contre l’injustice, l’inégalité, l’oppression. C’est une émancipation collective qui concerne des groupes entiers : femmes, classes populaires, peuples colonisés, minorités, etc.
La Révolution française avait pour visée l’émancipation politique du peuple français.
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3) L’émancipation spirituelle
L’émancipation spirituelle suppose qu’il y a quelque chose de plus grand que le moi: Dieu, le Soi, l’Absolu, la Conscience, une tradition spirituelle instituée, une tradition religieuse, peu importe le nom, avec ou sans majuscule. Si cette chose plus grande que soi est à échelle humaine: l’État, le service publique, l’action sociale, l’intérêt général, le bien commun, l’art, la science, la culture, on préfére parler d’émancipation individuelle sociale.
L’émancipation spirituelle cherche à dépasser l’ego, les illusions, pour se relier à cette dimension ultime. Elle implique souvent des pratiques de transformation intérieure : méditation, prière, ascèse.
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