
1) Le karma rationnel
Sur un plan rationnel, le karma est l’idée que ce tout ce qui arrive à une explication, que rien n’arrive sans cause. À ce niveau, pas de débat, le karma, c’est la loi de cause à effet, universable et vérifiable partout.
« Ce qui est rationnel est réel, et ce qui est réel est rationnel. » (Hegel, préface aux Principes de la philosophie du droit, 1821)
Selon le philosophe Hegel, la réalité, prise dans sa totalité et dans son développement historique, est l’expression du rationnel — de la Raison avec un grand R. Même ce qui semble absurde ou injuste à un moment donné fait partie d’un processus plus large de réalisation de la liberté. Les contradictions du monde finissent par produire un dépassement, un progrès vers une forme de rationalité plus haute.
Derrière les événements, il y une logique cachée, un ordre des choses, une rationalité, une nécessité à l’œuvre. C’est dans l’ordre des choses qu’il arrive du bonheur aux uns et du malheur aux autres. Les conflits et les souffrances, sont nécessaires dans le processus de diversification libre grâce auquel l’esprit universel (l’ensemble des possibles) se réalise.
Le sens de la vie, c’est que certaines causes entraînent certains effets et que tout ce qui existe, sans exception, est l’effet de différentes causes entrelacées avec une complexité telle qu’il arrive beaucoup de choses qu’on n’avait pas vu venir. Il arrive du malheur parce qu’il n’est pas possible que seul le bonheur arrive. Tout s’équilibre dans le fond.
Pour Hegel, la liberté ne consiste pas à s’affranchir égoïstement des contraintes mais à en saisir la nécessité et collaborer à leur action, en construisant une conscience collective.
2) Le karma moral
Au niveau moral, ça se corse, le karma devient l’idée que tout ce qui arrive est, soit directement mérité parce que des erreurs ont été commises, soit utile à quelque chose quelque part dans l’absolu.
Le karma morale reflète un besoin psychologique non pas, d’explication rationnelle mais de justification, de consolation, d’installation d’une barrière de protection autour d’une confiance en la vie plombée qui bat de l’aile.

On peut justifier le malheur de n’importe quel être innocent si commence à imaginer que, dans une mystérieuse vie antérieure, il s’est montré coupable de maltraitance.
C’est rassurant de se dire que la morale est sauve, qu’il y a une justice à l’œuvre partout dans l’univers et que tout ce à quoi on assiste équivaut à un juste retour des choses.
Cette idée, hautement controversée, fait son nid un jour ou l’autre dans tous les esprits. Chacun s’applique soit à la réfuter soit à la valider, selon son vécu, selon son tempérament, selon son caractère.
Le karma, en tant que concept moral ou spirituel de rétribution, ne peut pas être validé selon les standards de la méthode scientifique.
Cependant, en psychologie sociale ou en biologie du comportement, on observe des dynamiques qui ressemblent à des mécanismes karmiques: l’effet de réciprocité, les normes sociales, ou encore les conséquences naturelles des actions dans un environnement social donné.
Si on parle de karma sans dimension surnaturelle, on peut y voir une structure émergente d’interaction causale, fondée sur les effets à long terme de nos comportements dans des systèmes complexes.
3) Le cas Job

Au début, les amis de Job pensent que Job est responsable de ses propres malheurs. Si Job souffre, c’est forcément parce qu’il a péché, au sens où il est coupable de naïveté, il n’a pas assez anticipé le fait que le malheur arrive à tout le monde, vie exemplaire ou pas.
Job commence par refuser cette logique. Il maintient son droit voir son innocence récompensée et rejette catégoriquement l’idée de justice « karmique ».
Sa crise spirituelle, sa crise de foi aboutit à une réconciliation avec la vie.
4) Karma et but spirituel du yoga
Le karma n’est pas seulement une chaîne de causes et d’effets objectifs ou moraux mais une clé pour comprendre:
– L’illusion du moi (avidyā)
– Le cycle de la renaissance (saṃsāra)
– La libération intérieure (moksha ou nirvāṇa).
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